« Les chercheurs seront plus efficaces s’ils ont plus de liberté de gestion »
Question : Pouvez-vous nous dire et dans quel sens si le Fonds national de la recherche et de l’innovation pour le développement (FONRID) a pu influencer les processus politiques dans le cadre du projet SGCI ?
Inoussa Zongo : Le FONRID est positionné présentement comme un bailleur de fonds uniquement. Il n’est pas un influenceur direct de politiques. Mais, il accompagne les politiques. Si le FONRID avait le pouvoir sur les politiques, cela lui permettra de revoir son statut dans l’environnement actuel. Ce qui est un handicap aujourd’hui, c’est le fait que le FONRID soit une structure publique pure. Lorsque vous avez ce statut, vous devez respecter un certain nombre de règles dans votre fonctionnement. Les procédures de la dépense ne nous permettent pas de travailler sereinement et d’avoir des résultats. Elles ne sont pas forcément des choses qui permettent au FONRID d’avoir des résultats également. L’accent est plutôt mis sur les procédures que sur les résultats. Pendant qu’on planifie des activités sur une durée donnée, il arrive que la commande publique nous bloque dans l’exécution. Ce qui fait que les marges de manœuvre sont assez limitées.
Question : Qu’est-ce qu’il explique cet état de fait ?
Inoussa Zongo : Lorsqu’on prend le fonctionnement actuel du FONRID, les difficultés se trouvent surtout au niveau de la justification. Puisqu’on finance les projets qui sont parfois menés par des chercheurs privés et d’autres structures en dehors du FONRID. Ces structures ont des difficultés pour justifier en retour suivant les procédures des dépenses publiques. Si vous prenez la recherche, vous vous retrouvez par exemple en campagne en train de faire des piquets ou en train d’acheter des semences. Il n’est pas toujours aisé d’avoir des factures en bonne et due forme pour pouvoir justifier au budget de l’Etat. Donc ce positionnement fait que nous ne sommes pas toujours efficaces. Cela permet de réfléchir sur comment faire pour améliorer la situation du FONRID en termes de positionnement administratif et surtout le statut.
Question : Doit-on comprendre que le statut du FONRID au Burkina Faso est différent des celui des autres pays ?
Inoussa Zongo : Quand on prend les agences comme la NRF (National Recherche Fondation) en Afrique du Sud, c’est une grande machine qui élabore non seulement les politiques. Elle finance aussi les projets et les bourses. C’est elle qui constitue ce qu’on peut appeler au Burkina Faso, la Direction générale de la recherche scientifique et de l’innovation (DGRSI). Elle joue aussi le rôle du FONRID, du Centre national des œuvres universitaires (CENOU) et du Fonds national pour l’éducation et la recherche (FONER) et du Centre national de l’information, de l’orientation scolaire et professionnelle et des Bourses (CIOSPB). Mais en Afrique du Sud, la NRF est l’outil du ministère de la Recherche scientifique qui définit les politiques en matière de sciences et d’innovation. Donc si on prend les structures du Burkina Faso dans le même angle que la NRF, on se rend compte qu’on n’a pas forcement, la même capacité, la même liberté de définir les choses. Cela fait qu’au niveau politique nous avons des comptes à rendre à l’autorité. Nous ne sommes pas influenceurs de politiques, nous sommes sous la politique du ministère qui nous impose une certaine façon de faire les choses.
Question : Quelles suggestions faites-vous pour que le FONRID puisse influencer les processus politiques dans le cadre de la recherche ?
Inoussa Zongo : Nous avons fait voyager le Directeur général de la recherche scientifique et de l’innovation (DGRSI) et le Directeur général des études et des Statistiques sectorielles (DGESS) du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation qui sont les acteurs qui définissent les politiques pour leur permettre de partager les expériences des autres pays pour plus d’efficacité. Les chercheurs seront plus efficaces, s’ils ont plus de liberté de gestion.
Paténéma Oumar OUEDRAOGO
pathnema@gmail.com